Un regard socio-historique sur la rencontre entre les familles et professionnel-le-s de la familles

La production actuelle dans le champ sociologique de la famille nous mène devant un paradoxe. D’une part, de nombreux travaux font état d’une privatisation accrue des relations entre les membres de la famille et d’une pluralisation des manières de « faire couple » ou de « faire famille ». Et d’autre part, des travaux qui portent sur les politiques familiales et le développement d’expertises sur la famille et l’enfant, font état d’une diversification des modes d’encadrement des familles, d’une intrusion accrue de l’Etat, ou encore d’un contrôle social à la fois plus discret, plus large et plus insidieux. Au cœur de ce paradoxe, on retrouve les transformations du rapport entre famille et Etat. D’un côté, ce rapport est compris comme s’inscrivant dans le processus d’individualisation des pratiques et il est rapporté à une réduction des contraintes étatiques sur les familles. De l’autre, ce nouveau rapport est analysé par le biais d’une transformation des contraintes sociales qui ne s’actualisent plus uniquement sous la forme de lois ou d’autorités extérieures (le clan familial), mais qui se traduit par un auto-contrôle s’appuyant sur un savoir délivré par des experts. Au cours de mon travail de thèse, c’est donc à une analyse socio-historique du rapport actuel entre les familles et les experts que je compte me prêter, en m’intéressant aux archives et aux activités actuelles de l’Ecole des Parents du canton de Genève. Il s’agit d’une association, née en 1950, reconnue d’utilité publique et qui propose depuis ses débuts diverses prestations dans le but de « soutenir les parents à construire une belle relation avec leurs enfants ». Le public de cette association, qui vient généralement de sa propre initiative, est avant tout constitué de familles provenant des classes moyennes.